Co-création : Faire ou laisser Faire?




En explorant le dernier ouvrage d'une "Enseignante de Lumière", dont j'avais le sentiment de partager la vision, je suis tombé sur le passage suivant : "Le fait qu'il y a un quelconque pouvoir sur la vie découle de l'illusion de séparation"... 

Faire ou ne pas faire, voilà la question.

Pour étayer ce raisonnement, elle fournit cet argument que de nombreuses personnes dont je suis partagent: "Telle une goutte d'eau faisant partie d'un seul et même océan, celle-ci ne peut aucunement se détacher de lui".

Elle ajoute par ailleurs "Si nous pouvions réellement déterminer les événements de la vie, choisirions-nous alors la famine, les guerres, les souffrances"?

Le raisonnement semble aboutir à la conclusion évidente que la seule attitude à avoir serait de "laisser faire" la vie puisqu'on n'a aucun pouvoir sur ce qui se passe autour de nous...

Ce tour de passe-passe rhétorique est sans doute avec la suggestion de "vivre en conscience", "vivre dans le présent" et "s'affranchir de l'Ego", l'une des tentations les plus dangereuses de la "spiritualité".

L'Ego, une nécessité spirituelle.

Pour quelle raison? 
Imaginons tout simplement que mon "petit ego" qui est orienté vers la gestion des détails de mon quotidien se trouve placé dans une situation qui me met biologiquement en danger : un potentiel accident de la route, une agression physique ou morale, une situation toxique, etc...
Si je considère au départ que je n'ai aucun pouvoir sur la vie, que puis-je faire? Rien.

Cette conception du "non dualisme" ne prend pas en compte le paradoxe exprimée par l'image de la croix. Il faut savoir que l'utilisation de cette forme précède l'utilisation qu'en a fait le christianisme. La barre verticale du symbole exprime l'idée d'identité. C'est l'image de l'unité première, de la descente directe de l'esprit dans  l'incarnation. L'homme archétype se tient debout entre le ciel et la terre, entre le spirituel et le matériel.

La barre horizontale vient créer un point d'intersection. Nous reconnaissons à travers ce symbole la forme du corps. La rencontre entre les deux directions (qu'il faut imaginer en 3 dimensions) correspond spatialement à la zone du coeur. 

Cette ligne exprime la "ligne de conduite" de l'humain,  l'idée de la dimension de déplacement. Si je me contente de vivre la verticale, je choisis de me manifester comme de nombreux maîtres spirituels qui vivent 24h/24 dans cet état de "transe" qu'on appelle le "Samadhi". La plupart du temps, ils restent reclus dans leur ashram et communiquent avec leur disciples dans le silence. 

La spiritualité n'est pas un état à rechercher
c'est l'incarnation d'une évidence

Vivant à l'écart du monde, on peut considérer qu'ils ont choisi un mode d'existence végétal (Les arbres illustrent bien l'existence verticale. Ils relient le ciel et la terre et leur silence apparent est animé d'une intense vie intérieure qui correspond à l'Inspiration ). 

Choisir l'existence contemplative est un choix mais ce n'est pas la voie royale. A quoi bon s'incarner pour vivre sur un mode désincarné? Pour  en revenir à nos exemples de départ. Lorsque je cours le risque d'avoir un accident, je peux obéir à une intuition et adopter un geste réflexe qui va me permettre de ne pas quitter prématurément le plan d'incarnation.

Dans le domaine des arts martiaux, à travers la pratique, on découvre le mode de résolution de cette apparente incompatibilité entre l'horizontal et le vertical. Le rôle du Centre Vital et du souffle dans l'Aïkido permet de résoudre ce conflit. Le résultat c'est que là encore on est capable de "s'en sortir"

Lorsque l'on constate qu'on se trouve dans une situation toxique (un lieu, un travail, une relation ou autre circonstance qui nous fait clairement du mal) doit on se dire : "Il n'y a rien à faire, c'est la vie qui veut ça, je dois l'endurer...?"

Evoluer ou disparaître?

Mon expérience dans le domaine du développement personnel me permet de constater que cette attitude de "laisser faire la vie" est contre l'idée même d'évolution et de liberté intérieure. Pour le vérifier, il suffit d'observer l'état des pays où cette conception de la vie domine ou a dominé. L'extrême pauvreté de l'Inde pendant des millénaires suffit à s'en convaincre.

L'humain est certes une expression de l'Etre Global au même titre de l'ensemble de la création. Il  contribue à l'harmonie globale de la Création au même titre que les atomes et les formes les plus évoluées, visibles ou non. Cependant il ne faut pas oublier que c'est aussi une "évolution en cours". Nous devons nous rappeler que toute forme de vie incapable de s'adapter disparait du plan de la manifestation.

Mais nous sommes toujours là. Ce n'est pas le cas de toutes les espèces. Et non seulement avons-nous su nous adapter à notre environnement et à nos capacités mais on peut dire que nous avons fait du chemin depuis le temps où nos lointains ancêtres n'avaient pas encore compris comment faire un feu...

Pour éviter de se laisser séduire par cette idée trop tentante du "Laisser faire spirituel", il est indispensable de comprendre une chose simple, c'est que tout est spirituel. La texture même, l'essence de tout cela, c'est l'esprit. A quoi bon considérer  que la "spiritualisation" doi être l'objectif principal de notre présence ici.?

Faire : c'est exprimer l'omnipotence de l'Esprit

La vie n'est pas une recherche, c'est une expression. A travers l'incarnation, l'Esprit fait l'expérience de sa propre omnipotence. On peut exprimer ce "challenge" qu'il se propose en considérant qu'il co-crée avec lui-même. Il est des deux côtés : le laisser faire et le faire.

Jésus exprime bien ce paradoxe lorsqu'il déclare : "C'est le Père qui est en moi qui accomplit ses oeuvres." Réalisons que Jésus parle, se déplace, enseigne, réalise des miracles... Il ne se contente pas de prophétiser de méditer, de contempler en s'enfermant dans le silence. C'est un homme d'action qui va jusqu'au bout de la démonstration. Il agit mais reste conscient de le faire "Au nom du Père".

Il nous a ainsi démontré que nous aussi sommes capables de vivre dans "les deux mondes" sans y perdre de vue notre essence spirituelle. Comme lui, et à travers l'assimilation de l'exemple qu'il nous a donné par son "incarnation", nous sommes en mesure de réaliser que, comme lui, sommes capables de "transformer l'eau en vin" lorsque c'est nécessaire...

A travers les miracles, il montre la voie du "faire" tout en acceptant d'assumer le rôle que l'Humanité a pour mission de manifester chaque jour : obéir à la nécessité d'évoluer pour manifester à chaque instant le pouvoir créatif de la Vie.


Posts les plus consultés de ce blog

LE "BONHEUR" SANS NOM...

Transformation : des mémoires à la lumière

Vers la fin des religions